Détention corporative assurance vie

La détention corporative d'une police d'assurance vie

L'assurance-vie est un outil utilisé depuis fort longtemps dans le cadre de la planification financière et successorale des propriétaires d'entreprise. Ainsi, que ce soit pour financer une facture fiscale au décès, pour assurer un financement adéquat d'une convention d'actionnaires ou pour mettre en place un programme de capitalisation du contrat pour l'actionnaire, le contrat d'assurance-vie sera souvent détenu par une société ou par un groupe de sociétés ou même une fiducie. Or, dans certaines situations, des règles particulières entourant le choix du titulaire, du payeur des primes et du bénéficiaire devront être respectées pour éviter des conséquences fiscales et juridiques imprévues et non désirées. Dans ce contexte, l'objectif du présent guide sera de présenter les règles fiscales et juridiques applicables en la matière ainsi que des exemples de situations qui permettront d'optimiser la planification fiscale et financière des clients en affaires.

Pourquoi faire détenir une police d'assurance vie par une société ?

Il y plusieurs raisons d'affaires qui peuvent justifier la détention corporative d'une assurance vie. De façon générale, nous pouvons affirmer que la détention corporative d'une police d'assurance permettra, si les règles applicables sont respectées, d'en tirer des avantages financiers, fiscaux et juridiques certains. Parmi ces avantages que nous aborderons plus en détails, il y aura notamment la possibilité de profiter du compte de dividende en capital (CDC), la protection juridique du contrat à l'égard des créanciers, la simplicité de gestion des contrats, le partage plus équitable du paiement de la prime ainsi que la réduction du coût fiscal de la prime.

Bien que ces avantages soient indéniables, plusieurs règles fiscales devront être respectées pour en tirer pleinement profit.  Dans certaines situations et de façon plus particulière en présence d'un groupe de sociétés, il sera nécessaire de bien établir qui sera le titulaire du contrat, qui sera le bénéficiaire de la prestation de décès et finalement qui payera la prime prévue. Cette démarche est essentielle, car si l'assurance vie n'est pas détenue à la bonne place et de la bonne façon, des conséquences fiscales et financières défavorables pourront survenir.

While these are valuable benefits, certain tax rules must be satisfied in order to get the most out of them.  In some situations, and specifically where a group of companies is involved, it’s important to clearly establish who will be the policy owner, who will be the beneficiary for the death benefit, and who will pay the premium. This step is critical, because if life insurance is not placed in the correct manner, there may be unfavourable financial and tax implications. 

Une des questions importantes relatives à la police d'assurance vie dans un contexte d'affaires consiste à déterminer le mode de détention du contrat. En terme simple, on pourrait résumer la question comme étant : est-ce qu'un actionnaire devrait faire détenir sa police d'assurance vie personnellement ou par l'entremise d'une société. Pour répondre à cette question, voici certains éléments clés à prendre en considération relativement au mode de détention corporatif d'une police d'assurance vie.

Qu'elle soit détenue personnellement ou par le biais d'une société, la prime d'une police d'assurance vie n'est généralement pas déductible1 du revenu de celui qui la paye2. Dès lors, le taux d'imposition du payeur de la prime déterminera le coût réel après impôt à débourser. Dans ce contexte, il pourrait être avantageux de faire détenir et payer la prime par une société qui bénéficie souvent d'un taux d'imposition plus avantageux que son actionnaire. À titre d'exemple, une prime d'assurance de 5 000 $ par année qui doit être assumée personnellement par un actionnaire qui a un taux d'imposition marginal de 50 % exigera un déboursé de 10 000 $3 après impôt. En contrepartie, cette même prime payée par une société qui a un taux d'imposition d'environ 17 %4 n'exigera qu'un déboursé d'environ 6 024 $ après impôt. Ainsi, pour la même prime d'assurance, une économie de 3 976 $ par année est engendrée par la détention corporative de la police d'assurance vie. Comme la durée de vie d'un contrat d'assurance vie est généralement longue, cette économie peut s'avérer substantielle au fil des années.

1 En vertu du paragraphe 18(1) b) de la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR).

2 Il n'existe qu'une exception à cette règle dans le cas où un contribuable emprunte dans le but de produire un revenu et qu'il doit céder le contrat d'assurance à son créancier en garantie de l'emprunt. La déduction de la prime sera uniquement possible si toutes les conditions énumérées à l'alinéa 20 (1) e.2) de LIR sont remplies.

3 La formule pour calculer le coût réel après impôt est la suivante : Prime en $ / 1- ( taux marginal imposition en %)

4 Taux d'imposition fédéral/provincial pour une PME dans le secteur primaire et manufacturier sur les premiers 500 000$ de revenus « actifs » d'entreprise.

Lorsqu'il existe une différence d'âge significative entre deux actionnaires où que l'état de santé de l'un deux exige une surprime, la détention personnelle des contrats crée une pression financière sur celui qui doit assumer un niveau de prime plus élevé. Au fil des ans, cette situation pourrait créer un sentiment d'iniquité pour l'actionnaire.

Pour remédier à cette situation, la détention et le paiement de la prime au niveau corporatif permet de partager au prorata de leur intérêt respectif dans la société le paiement de la prime à assumer par chacun des actionnaires.

Lorsque les polices d'assurance vie sont détenues personnellement par les actionnaires, il pourrait devenir difficile de vérifier si chacun d'eux paient les primes exigées.  Cette difficulté est amplifiée avec un nombre élevé d'actionnaires. Cette problématique est souvent découverte lors d'un décès d'un actionnaire et peut compromettre sérieusement le financement d'un rachat d'actions en cas décès.

La détention corporative permet d'éviter cette situation car chacun des actionnaires a accès aux livres des minutes et aux états financiers de la société pour valider régulièrement l'état des polices d'assurance en vigueur.

En présence de plusieurs actionnaires, le risque de confusion à l'égard des différents polices d'assurance vie augmente de façon importante. À titre d'exemple et dans le cas d'une détention personnelle, le nombre de polices d'assurance vie qui seraient requis pour quatre actionnaires serait de 12 contrats individuels (4 actionnaires X 3 contrats). Dans la même situation, la détention corporative ne nécessiterait uniquement quatre polices d'assurance vie (une pour chacun des actionnaires). De plus, la détention corporative permettrait de réduire les frais de contrats et permettrait d'obtenir une meilleure tarification au niveau de la prime étant donné que le capital assuré serait individuellement plus élevé.

Le compte de dividendes en capital (CDC)5 est l'un des mécanismes d'intégration fiscale prévus par la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR)6.

L'un des avantages indéniables liés à la détention corporative d'une police d'assurance vie est la possibilité pour les actionnaires d'obtenir des dividendes libres d'impôt par le biais du compte de dividendes en capital (CDC) tel que le précise l'alinéa d) du paragraphe 89 (1) de la LIR. Ainsi, le produit net d'une police d'assurance vie est ajouté au compte de dividende en capital (CDC) d'une société privée.

L'expression « produit net » est définie comme étant l'excédent du produit de la police d'assurance vie reçu à la suite du décès de la personne dont la vie était assurée sur le coût de base rajusté (CBR) de la police immédiatement avant le décès de la personne assurée.

Exemple :

Une société privée est bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie comportant une prestation de décès de 1 000 000 $. Le CBR du contrat au moment du décès de l'actionnaire assuré est de 150 000 $. Le montant qui sera porté au crédit du CDC de la société sera de 850 000 $ (1 000 000 $ - 150 000 $). Ce montant pourra être versé libre d'impôt aux actionnaires de la société à titre de dividende en capital. Le solde de 150 000$ pourra être versé comme un dividende imposable aux actionnaires.

L'utilisation de plusieurs sociétés et le CDC

L'Agence du revenu du Canada (ARC) a toujours manifesté son intérêt à contrer les manœuvres qui visaient à exploiter indument le traitement préférentiel appliqué au compte de dividendes en capital (CDC) des sociétés qui touchent un produit d'une assurance vie7. Ainsi, certaines structures de détention d'une police d'assurance permettaient à ces dernières de créditer le plein montant de la prestation de décès à leur CDC, sans réduction correspondante du CBR du contrat.

Souvent, dans ces situations, une société de gestion détenait le contrat et désignait ensuite une société opérante comme bénéficiaire de la prestation d'assurance vie. Ainsi, puisque la société opérante n'était pas propriétaire du contrat, elle pouvait demander que le plein montant de la prestation de décès soit crédité à son CDC sans réduction relative au CBR du contrat.

Le budget fédéral de 2016 a mis fin à cette pratique pour les décès survenant à partir du 22 mars 2016 de sorte que la prestation de décès est maintenant réduite du CBR aux fins du calcul du crédit au CDC, quelle que soit la structure de propriété corporative du contrat d'assurance vie mise en place. 

Finalement, le budget fédéral de 2016 a aussi proposé d'instaurer un mécanisme de communication des renseignements qui s'appliqueront lorsqu'une société ou une société de personnes n'est pas un titulaire du contrat d'assurance, mais a le droit de recevoir une prestation prévue par ce même contrat. Au fil des ans, l'ARC s'est souvent opposée à ce que deux sociétés distinctes puissent être désignées comme titulaire et bénéficiaire pour le seul bénéfice du CDC. Cette nouvelle exigence de déclaration permettra à l'ARC de détecter d'emblée ce genre de situation, sans devoir attendre au décès, moment où se fait le calcul du CDC.

La protection du contrat à l'égard des créanciers

Sous réserve des exceptions prévues par la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et la législation provinciale8, une police d'assurance vie avec une valeur de rachat constitue un actif qui peut être généralement saisi par les créanciers du titulaire du contrat. Par exemple, le contrat d'assurance détenu par une société fera partie des actifs de cette dernière et la valeur de rachat du contrat pourra être saisie par le syndic en cas de faillite. D'autre part, si l'assurance vie a été souscrite pour financer une convention entre actionnaires, la prestation de décès payable à la société au décès de l'un des actionnaires pourrait être assujettie aux réclamations des créanciers de l'entreprise. Pour se prémunir contre ce genre de risques, certaines structures de détention corporative du contrat peuvent être mise en place.

D'abord, lorsqu'une société par actions est titulaire du contrat d'assurance vie, celui-ci est à l'abri des créanciers personnels des actionnaires ou d'une poursuite judiciaire à l'égard de l'un d'entre eux9. Par ailleurs, il serait aussi possible de faire détenir le contrat d'assurance par une société de gestion qui serait elle-même actionnaire d'une société opérante. Cette structure de détention du contrat pourrait permettre de protéger la police d'assurance vie à l'égard des créanciers de la société opérante dans la mesure où la société de gestion ne garantit pas les obligations de cette dernière.

Finalement, il faut savoir cette protection n'est toutefois pas complète et elle ne s'applique pas dans toutes les circonstances. Par exemple, le fait de transférer des capitaux vers un contrat d'assurance vie ou de choisir une structure de détention corporative particulière pour une police d'assurance vie ne confère pas une protection absolue contre les créanciers et ne met pas automatiquement le contrat à l'abri d'une saisie si le syndic réussit à prouver que l'opération avait pour but d'éviter de rembourser les créanciers10.

En cas de doute à propos des risques juridiques liés à la détention corporative d'une police d'assurance, il serait avisé de consulter un conseiller juridique en la matière.

5 Le paragraphe 89(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR) définit différents types de biens et de distributions, y compris le contenu du compte de dividendes en capital. Au Québec, le paragraphe 570 b) L.I. renvoie à la LIR. Le bulletin IT-66R6 de l'ARC examine le mode de fonctionnement et les composantes du compte de dividendes en capital.

6 Voir le guide fiscal : Le compte de dividende en capital publié par la Financière Sun Life pour plus de détails à ce sujet. the-capital-dividend-account-fr.pdf

7 En applicant notamment la RGAÉ. Voir Interprétation technique 2004-0065461C6 de l'ARC, L'ARC, Impôt sur le revenu - Nouvelles techniques N 44, 14 avril 2011 et l'Interprétation technique 2010-0371901C6 de l'ARC.

8 Voir la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, L.R.C. (1985), ch. B-3 (LFI). Au Québec, c'est le lien de parenté entre le titulaire et le bénéficiaire qui indique si le contrat est protégé ou non voir les articles 2455 C.c.Q, 2456 C.c.Q., 2457 C.c.Q. et 2458 C.c.Q.

9 Sous la réserve de la levée du voile corporatif et des garanties personnelles qui sont accordées par les actionnaires au créancier, le cas échéant.

10 Voir la décision de la Cour suprême du Canada : Banque Royale du Canada c. La Nord-Américaine Compagnie d'Assurance vie et Balvir Singh Ramgotra (1996) 1 R.C.S. 325

Lorsque la structure de détention du contrat d'assurance vie est réalisée dans un groupe de sociétés où il y a différentes combinaisons possibles de détenteur, titulaire, bénéficiaire et payeur de la prime, il peut en résulter des avantages imposables ou des inclusions aux revenus de l'une ou l'autre des sociétés impliquées selon la structure choisie.

Ainsi, depuis quelques années, l'ARC a revu sa position11 quant à la possibilité qu'une société mère(Gesco) puisse être bénéficiaire d'une prestation de décès alors que sa filiale(Opco) en serait le titulaire et le payeur de la prime. L'ARC est d'avis que dans une telle situation, il en résulterait un avantage imposable à la société mère (Gesco) en vertu du paragraphe 15(1) L.I.R. Cette interprétation s'applique depuis le 1er janvier 2010 et pour les contrats déjà émis avant cette date, depuis le 1er janvier 201112. Dans les autres cas, par exemple lorsque la société mère(Gesco) paierait les primes relatives à une police dont sa filiale(Opco) en serait le titulaire et bénéficiaire, l'ARC précise qu'elle pourrait appliquer, selon les faits, le paragraphe 246(1)13, l'article 9 ou l'alinéa 12(1)x)14 de la LIR.

Exemples de structures de détention corporative d'une police d'assurance vie

Pour bien comprendre la portée de ces différentes dispositions fiscales précédentes, il convient de présenter différentes structures corporatives de détention d'une police d'assurance vie afin d'en analyser les conséquences fiscales, le cas échéant. Les exemples des pages suivantes présentes différentes structures de détention corporative d'une police d'assurance vie ainsi que les conséquences fiscales qui s'y rattachent.

Structure de détention 1

Société de gestion A: bénéficiaire
Société opérante B: titulaire et payeur

Le choix d'une telle structure déclencherait l'application du paragraphe 15(1) de la LIR. Par conséquent, la société de gestion A devra déclarer un avantage imposable égal au montant de la prime si elle n'ajoute pas ce montant(prime) à son revenu imposable. De plus, la détention d'une police d'assurance-vie avec une valeur de rachat importante par la société opérante B pourrait comporter un autre désavantage fiscal, tel que la perte possible pour l'actionnaire du droit à la déduction du gain en capital lors de la vente des actions admissibles d'une petite entreprise(AAPE).

D'autre part, s'il y avait vente de la société opérante B et transfert de la police d'assurance, cela entraînerait une disposition et un possible gain sur police pour cette dernière. Finalement, cette structure de détention pourrait comporter des risques à l'égard de la valeur de rachat de la police détenue par la société opérante B advenant une poursuite devant les tribunaux ou la faillite de cette dernière.

Structure de détention 2

Société de gestion A: titulaire et payeur
Société opérante B: bénéficiaire

Dans cette structure, la société opérante B est bénéficiaire du capital décès tandis que la société de gestion A en est titulaire et payeur du contrat. D'emblée, il n'y a pas dans ce cas, application du paragraphe 15(1) LIR.

a) Si la société opérante B remboursement la prime à la société de gestion A

Par contre, si la société opérante B rembourse les primes à la société de Gestion A, une analyse de l'article 9 de la LIR et de l'alinéa 12(1)(x) de la LIR doit être effectuée pour déterminer si la société de Gestion A devrait inclure dans ses revenus un montant égal au remboursement de primes effectué par la société Opérante B.

D'abord, l'article 9 LIR précise que le revenu qu'un contribuable tire d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition est le bénéfice qu'il en tire pour cette année. Dès lors, si la société de Gestion A encaisse annuellement le montant exact des primes payées à l'assureur, à moins d'un gain généré lors du rachat du contrat, aucun revenu ne sera généré et l'article 9 L.I.R. ne devrait pas trouver application dans cette structure.

L'autre disposition fiscale qui pourrait être invoquée par l'ARC est l'alinéa 12(1) x) LIR. Cette disposition a une portée plus large et générale que l'article 9 LIR et elle prévoit que les paiements reçus (sous forme d'une prime notamment) d'une autre personne qui exploite elle-même une entreprise ou qui gagne un revenu de bien doit être inclus dans le revenu du contribuable. Dans ce contexte, si la société de gestion doit inclure dans son revenu la prime qui n'est pas déductible par ailleurs, il en résulterait une double imposition. Le risque lié à cette disposition s'appliquerait plus particulièrement lorsqu'une portion de la prime est déductible16.

Il serait possible d'éviter l'application possible de l'alinéa 12(1)x) L.I.R. par le versement de dividendes en nature qui devront être déclarés annuellement par la société opérante B en faveur de la Société de gestion A. Une convention écrite entre les actionnaires devrait confirmer que le dividende servira à payer la prime à l'assureur afin que le contrat demeure en vigueur. 

b)  Si la société opérante B ne remboursement pas la prime à la société de gestion A

Si la société opérante B ne rembourse pas les primes à la société gestion A, le paragraphe 246(1) de la LIR pourrait peut-être trouver application en considérant que le paiement de cette prime procure un avantage à la société opérante B.
La valeur de cet avantage devrait être incluse dans le revenu imposable de la société opérante B. La valeur de l'avantage reçu par la société Opérante B dépendra en grande partie de son statut de bénéficiaire révocable ou irrévocable. Dans le cas d'une désignation de bénéficiaire révocable, cette valeur serait possiblement très faible voir même nulle.  
Finalement, dans la mesure où les sociétés  n'ont aucun lien de dépendance et qu'il est établi qu'il s'agit d'une opération commerciale véritable conclue entre elles, le paragraphe 246(1) L.I.R. ne trouverait pas application en vertu du paragraphe 246(2) L.I.R.

Structure de détention 3

Société de gestion A: titulaire, payeur et bénéficiaire
Société opérante B: Nil

Cette structure de détention de la police d'assurance-vie ne comporte aucun avantage imposable pour les sociétés A et B. De plus, cette structure ne comporte pas de risques particuliers pour les créanciers. La détention de la police d'assurance-vie par la gestion A permet d'éviter le transfert éventuel de la police en cas de vente de la société opérante B.

Structure de détention 4

Société de gestion A: nil
Société opérante B: titulaire, payeur et bénéficiaire

Cette structure de détention de la police d'assurance-vie ne comporte aucun avantage imposable pour les sociétés A et B. Néanmoins, si la police d'assurance comporte un volet d'épargne, cette dernière pourrait devenir un actif contaminant afin de déterminer si les actions de la société sont admissibles à la déduction pour gain en capital lors de la vente des actions de la société17.

D'autre part, la vente de la société opérante B pourrait entraîner le transfert de la police d'assurance et un gain sur police imposable pour la société opérante B pourrait survenir, le cas échéant. Finalement, cette structure de détention pourrait aussi comporter des risques à l'égard des créanciers qui pourraient saisir la valeur de rachat au contrat advenant une poursuite judiciaire ou la faillite de la société opérante B.

Tableau synthèse de différentes structures de détention et des impacts fiscaux possibles
TITULAIRE PAYEUR BÉNÉFICIAIRE REMBOURSEMENT DES PRIMES AU PAYEUR ARTICLES APPLICABLES (LIR) POLITIQUE FISCALE DE L'ARC
Opérante Opérante Gestion Non 15(1) Avantage pour Gestion
Gestion Gestion Opérante Oui 9 ou 12(1)(x) Inclusion aux revenus possible pour Gestion
Gestion Gestion Opérante Non 246(1) Avantage pour Opérante
Gestion Gestion Gestion NA Aucun Aucune
Opérante Opérante Opérante NA Aucun Aucune

11 Voir les interprétations techniques 2004-0065461C6 et 2009-0347291C6

12 Au Québec, l'ARQ applique cette position depuis 2008.

13 Lorsque les actionnaires n'ont pas de lien de dépendance entre eux, le paragraphe 246(2) LIR rend inapplicable le paragraphe 246(1) LIR ce qui fait en sorte qu'aucun avantage ou inclusion dans le revenu ne devrait survenir.

14 Lorsque les actionnaires n'ont pas de lien de dépendance entre eux, le paragraphe 246(2) LIR rend inapplicable le paragraphe 246(1) LIR ce qui fait en sorte qu'aucun avantage ou inclusion dans le revenu ne devrait survenir.

15 Pour l'ensemble des différents structures présentées, l'actionnaire détient 100 % des actions participantes et votantes de la société de gestion A et la gestion détient 100% des actions participantes et votantes de la société opérante B.

16 Voir l'article 20(1)e.2) LIR.

17 Selon la définition du paragraphe 110.6(1) de la LIR relatif à une « action admissible de petite entreprise ».

En présence d'un groupe de société, il est souvent fréquent de constater la présence d'une fiducie au sein de la structure corporative des actionnaires. La fiducie, comme patrimoine d'affection distinct, est souvent utilisée comme outil de planification fiscale. Ainsi, que ce soit pour procurer une protection du contrat, une diminution des frais d'homologation au décès ou pour permettre une gestion et un contrôle efficace des fonds générés par une société, l'utilisation d'une fiducie est souvent suggérée par les conseillers juridiques à leurs clients.

Une fiducie pourra souscrire et être titulaire d'une police d'assurance vie lorsque son acte constitutif le permet. Au décès de l'assuré, la prestation de décès sera versée à la fiducie à titre de bénéficiaire de la police et sera distribuée conformément à l'acte de fiducie. L'un des avantages fiscaux liés à la détention d'une police d'assurance vie par une fiducie est le fait qu'une police d'assurance vie n'est pas un bien en immobilisation admissible selon la LIR et qu'en conséquence la disposition réputée des biens détenus par la fiducie tous les 21 ans n'affecte pas les polices d'assurance vie détenues par une fiducie. D'autre part, et comme tout autre bien de la fiducie, un contrat d'assurance vie pourrait être transféré aux bénéficiaires du capital de la fiducie sans conséquence fiscale si les conditions du paragraphe 107(2) de la LIR sont réunies18. À l'opposé, il n'est pas possible d'effectuer le roulement fiscal d'une police d'assurance vie détenue par une société en faveur d'une fiducie, car un contrat d'assurance vie n'est pas un bien en immobilisation admissible au sens de l'article 73 de la LIR. Un tel transfert constituerait une disposition au sens du 148 (7) de la LIR et pourrait engendrer des conséquences fiscales.

Finalement, si une fiducie est directement bénéficiaire d'une prestation de décès, elle ne pourra pas profiter du mécanisme de compte de dividendes en capital (CDC) qui est uniquement réservé aux sociétés privées bénéficiaires d'une assurance vie. De la même façon, l'ARC a précisé que le produit d'assurance vie reçu par une fiducie et versé par la suite à une société fermée désignée comme bénéficiaire ne pouvait pas être inclus dans le CDC de cette dernière19.

18 Voir l'interprétation technique 2011-0391781E5. Selon L'ARC, ce paragraphe aurait préséance sur le paragraphe 148(7) LIR.

19 Voir l'interprétation technique 2011-0399771C6.

Le choix d'une structure de détention corporative d'une police d'assurance vie devrait être bien documenté et consigné par voie de résolution dans les livres des minutes de la société. En conséquence, il est recommandé d'y inscrire les motifs et les raisons commerciales20 qui ont justifié un mode de détention en particulier. Ainsi, en cas d'une vérification éventuelle par les autorités fiscales, il y aura peu de risque qu'une interprétation divergente puisse survenir et cause des répercussions fiscales non souhaitables.

20 Exemples de raisons commerciales : financement d'une convention entre actionnaires, purification des actifs pour la qualification des actions à la DGC, désir de conserver la police après une vente de la société, protection à l'égard des créanciers, etc.

Malgré les positions prisent par l'ARC prise en 2010 et plus récemment dans budget fédéral de 2016, il demeure toujours pertinent de planifier correctement la détention corporative d'un contrat d'assurance-vie avec vos clients. Comme il n'y a pas de structure optimale pour tous les cas, l'évaluation d'une structure de détention appropriée en fonction des besoins et de la situation des clients est recommandée. Ainsi, il est important d'encourager le client à consulter ses conseillers juridiques et fiscaux avant de choisir un mode de détention en particulier et ce, surtout dans les situations plus complexes.

Le présent document ne vise qu'à fournir des renseignements d'ordre général. La Sun Life du Canada, compagnie d'assurance-vie ne fournit pas de conseils juridiques, comptables ni fiscaux aux conseillers ni à leurs clients. Avant qu'un client ne prenne une décision fondée sur les renseignements contenus dans ce document, ou avant de lui faire une recommandation quelconque, assurez-vous qu'il demande l'avis d'un professionnel qualifié qui étudiera sa situation en profondeur sur le plan juridique, comptable et fiscal, le cas échéant

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